Lanterne rouge

L'ombre au port noble et trousses riches sous l'aclat de l'astre carmin s'avançait rapidement dans les ruelles, bordées par les hautes et noires murailles des geôles d'Isaz. Repos des sentinelles sortant de faction, les maisonnées avoisinantes formaient un dédale nimbé de la lueur rouge perçant des fenêtres à persienne et de l'encolure des portes grossières gauchement refermées, dans lequel l'érudit errait sans hésitation, le bâton frôlant le sol sans le toucher jamais, le regard du paladin perçant sous la chappe, fixe et aussi glacial que le silence morbide s'attardant dans les ruelles, parfois brisé par quelques cris s'élevant au sein des masures, mais s'arrêtant net à une intersection, face à une demeure la constituant. S'approchant à vive allure, l'homme toqua machinalement du sommet de son jonc à la porte de la masure, et n'eut le temps que de percevoir du mobilier s'ébranlant dans la demeure qu'une vocifération cristalline et coupée par l'émotion répondit à son acte.

"Papa!"

La porte s'entrouvrit, laissant paraître la face suspicieuse d'une belle femme, puis s'ouvrant complètement alors que la sérénité allégeaient les traits de la résidente une enfant, se pressant d'aller à la rencontre de l'érudit, qui esquissa un sourire sous sa chappe rouge alors que de petits bras l'enserraient affectueusement, et qu'une tête s'apposait sur son torse. La femme jeta un regard, puis le balança vers le paladin, mais celui-ci entrait déjà dans la masure, averti des mots qu'elle aurait pu lui adresser, n'attendant pas qu'elle l'y invite et rabattant l'entrée de la maisonnée lui-même. L'enfant, heureuse, abandonnait le paladin un instant, un rire enjoué s'élevant de sa gorge, mais deux regards froids l'enjoignant de concert à cesser le brisant net, bien que la petite fille ne s'en vexa pas, et conserva un sourire identique à celui, bien que moins affiché, de l'érudit, débarrassant sa tête du lourd capuchon.

"Charlotte, va t'asseoir. Akana, nous devons discuter."