Arrière-boutique

La nuit ayant repris ses droits sur la ville, les teintes de l'Infâme s'affichant sur les façades des demeures exposées à sa clarté, Ellamin, cheminant à travers les ruelles desertes, sa face des plus sombres souffrant de la lueur de torches trônant sur les murs atenant aux rues, parvint, ses pas lourds brisant l'éphémère silence qui regnait la nuit, devant une boutique, tenant lieu de rez-de-chaussée à une haute bâtisse se dressant face à lui. Apposant sa main sur la poignée d'une porte qui ne cedait, verrouillée, l'érudit lâcha son étreinte, puis, quelques secondes passant où il se tenait immobile, toisant ce système mécanique avec dégoût, invoqua des flammèches qui, parcourant son poing, vinrent frapper en même temps que celui-ci la porte par deux fois, à ses gonds, qui cédèrent après que deux coups bruyants n'aient résonné dans la rue, précedant un énorme fracas, celui de la porte qui s'affaissait.

*Fi de la discretion, qu'ils craignent les démons brisant les murs et disparaissant dans les ombres !*

Pénétrant dans la boutique, l'érudit se hâta, sa cape volant à ses trousses alors qu'il s'engoufrait en courant dans cette pièce exigu ou se faisaient les marchés de ce vendeur en soieries, et martela à nouveau une porte qui s'ébranla sur le coup, laissant apparaître un négoce d'un tout autre ordre alors qu'Ellamin accedait à l'arrière-boutique.

"Par le Père Celeste, qu'avons-nous là? Des hérétiques affairés à leurs sournoiseries?"

Le négociant, entouré d'un comité de six autres personnes, ne bougea pas, la peur le tétanisant, tandis que ses acolytes préféraient tenter de fuir, mais le payaient cher. Un rictus se mêlant à une expression de rage bien singulière déformant son visage, l'érudit ne prononça que quelques mots, qui mirent le plafond de la salle exigue et les murs le soutenant en flammes, les tissus entreposés flambant tant que les compères se retrouvaient vite cerclés de feu, puis leur chair dévorées par le monstre pyromantique, hormis le négociant qu'Ellamin tirait hors de la salle, le feu s'épendant de l'arrière-boutique à la pièce principale, alors que l'homme laissait échapper quelques cris de terreur.

"Paix, marchand, ou je laisse les flammes te lécher jusqu'à ce que tu expies tes complots de ton propre chef, avec cette langue que la chaleur aura gonflé !"

Eveillés par le sourd bruit de la porte d'une demeure se brisant sous des coups répétés, des citoyens virent au dehors l'individu en noir qui pénétrait dans la boutique. En hâte, ils quittaient leurs maisons, effrayés, pour s'éloigner de l'individu, et informer la milice de ces faits. Le quartier marchand en émoi, depuis mes appartements distants de quelques rues du temple, je percevais déjà, alors que des gardes venaient à ma rencontre, que des flammes s'élevaient, leur lueur rougeoyante déteignant sur les façades des habitations, et une noire fumée commençant déjà à voiler la Lune d'Yam.

"Il y a une agression chez un marchand, visiblement. Là où le foyer s'est déclaré !"

#Un incendie se déclarant après une intrusion nocturne, ça n'augure rien de bon.#

Quittant ma demeure en vitesse, alors que des cris se faisaient entendre à mesure que l'on s'approchait moi et les quatre sentinelles m'accompagnant, je parvins après quelques minutes de course haletante où mes yeux remis du reveil en sursaut se perdaient sur les flambeaux éclairant les ruelles face à ce commerce, et dégainais mon arme, de concert avec les gardes, à qui j'adressais un regard sérieux, désirant que l'intervention soit appliquée.

"Formez un bînome, et suivez moi. Vous deux, restez en arrière, que chacun se tienne à un axe de la ruelle, demande quelques renforts si necessaire, et maintienne les citoyens en arrière, c'est trop dangereux, d'autant qu'il faut dégager un espace pour les sapeurs d'incendie."

Entendant les cris aigues provenant depuis la boutique dont on distinguait les flammes qui progressaient depuis les salles d'entrepôt, trop peu aérées du fait du peu d'espace dont dispose le commerçant, je regarde le coeur de la boutique depuis la rue et appelle mes partenaires pour me soutenir alors que je vais entrer pour secourir ce malheureux, aucun support ne semblant disponible pour l'instant.

"Il y a encore un civil, peut-être l'agresseur s'il n'est pas mort, mais il faut aller l'aider, pas le temps d'attendre les vigiles urbani, suivez-moi sans peur !"

Approchant son poing couvert de flammes, Ellamin l'appliqua sur l'échine du commerçant, qui criait, ployant sous la douleur, alors que le brasier gagnait sur la pièce principale de la boutique. Les larmes aux yeux, alors que l'érudit le toisait froidement, ne retirant nul plaisir de tel procédé, mais n'en attenuant la rigourosité pour autant, le négociant hurla quelques mots à son tortionnaire, alors qu'il peinait à s'entendre lui-même, les flammes lui ayant déjà dévoré l'une de ses oreilles dont la chair était mise à nue, et dans un état aussi lamentable que son tympan droit.

"Ils- Ils sont à Fa-Fa"

Les sanglots entrecoupant sa voix, le commerçant ne put achever sa phrase, mais Ellamin parvint à en comprendre tout de même le sens. Plongeant son regard dans celui de son pantin, l'érudit approcha sa figure de celui-ci, affichant cette expression si particulière qui rendait ses subalternes si nerveux quelques instants avant de subir les foudres du paladin.

"Pauvre larve, un hérétique, un lâche, immonde et stupide... Merci, laisse-moi donc t'offrir cette chrysalide de feu, infidèle !"

Saisissant l'homme au collet, le paladin n'afficha qu'un maigre sourire, constatant sa terreur, et repoussant le négociant dans le brasier qui s'étendait derrière lui. Percevant des ombres se mouvant sur le palier de cette porte qu'il avait abattue, l'érudit invoqua des flammes qui vinrent enflammer les pavés en une ligne droite de la boutique jusque dans les rues, l'empreintant alors que les flammes léchaient le visage de ces badauds et miliciens réunis dehors, profitant que l'extrème clarté ne pousse ces hérétiques à clore leurs yeux pour s'éclipser, courant à travers la foules réunie, et marquant un soldat sur son passage, lui clacinant le flanc droit du visage en y apposant sa main pour le repousser.

*Se cacher désormais...*

Surpris par ce flot de feu jaillissant sous nos yeux, je protégeais sommairement les hommes se tenant à l'arrière de mon bras gauche, ne sachant ce qui se passait alors que je me couvrais les yeux de la main étreignant mon arme, mais ressentant une présence fendais l'air de son fil, repoussant les flammes et entrapercevant cet individu, dont il ne faisait aucun doute qu'il était le responsable de ce chambardement. La foule s'agitant, hurlant, un garde criant de douleur avant qu'on ne le découvre le visage brûlé, je reprenais le commandement, navré pour tous ces citoyens et miliciens blessés et choqués, mais ne perdant la mesure de la situation.

"Gabrand, maintenez la foule, et vous deux, portez le signalement de ce scelerat aux sentinelles en faction dans le quartier du temple, que les issues soient closes à partir des verins du cloaque."

Alors que je parlais à ce lieutenant et aux deux soldats apparemment jeunes qui se tenaient sur la gauche du bâtiment, je plongeais à travers la porte dont le feu dévorait déjà l'encadrement, prononçant mes derniers mots alors que le démon luminescent effleurait déjà mes joues. Dans la pièce, sous les volutes étouffantes qui s'accumulaient et la morsure des flammes, je fendais l'air de mon épée, déplaçant l'air se rarifiant afin de repousser le brasier qui allait me cerner. M'avançant, appliquant ma main gauche sur mon visage pour que la fumée ne m'étouffe, je rangainais mon épée, et attrapais un homme écroulé au sol, sa peau entamée par le feu, mais un souffle rauque me semblant parvenir de son corps gisant sur une pièce de roc constituant le sol de la boutique que le feu ne pouvait entamer.

#Vous seriez presque chanceux...#

Le portant, entravé, j'évitais les flammes qui du sol à la voûte dansaient et frôlaient nos peaux, ne pouvant les repousser. Ainsi bloqué, je m'avançais jusqu'à la porte, et voyant que le plafond cédait lançait le pauvre individu par l'encadrement de l'entrée, le faisant sortir, alors que je me trouvais cerné. Un étai s'effondra sur moi, mais ma main désormais libre je me saisissais en hâte de ma lame et fendais la pièce de bois que le feu avait heureusement, je ne sais guère si c'est le mot, endommagé, mais ne pouvais en supporter davantage et croulais sous les vapeurs suffocantes qui saturaient la pièce, les flammes la léchant constituant mon ultime vision de l'instant alors que je sentais jusqu'à mon crâne fulminant.

*Par notre Père Celeste, ils sont partout...*

Adossé au mur d'une étroite ruelle dans laquelle l'ombre était assez profonde pour l'abriter, Ellamin observait les rues, où des hommes en armure couraient en tous sens, et irritaient l'érudit qui redoutait d'avoir du mal à se rendre à cette cité qu'on lui avait indiqué si la situation demeurait ainsi. Il ne savait guère quelles mesures avaient été prises envers lui, mais le paladin était désormais doté d'une determination inébranlable alors que l'issue de sa mission se détaillait.

"Ces hérétiques ne m'auront pas ! Donnons-leur un avant-goût des enfers réservés aux fils de l'Infâme."

De colère, Ellamin grommela, attirant une sentinelle, dont le sang macula bientot les murs de la ruelle, une fois qu'une lame ait transpercé sa tête du menton au front après s'être de trop approché de l'Inquisiteur, peu enclin à laisser des dévots de Yam lui barrer la route.

M'éveillant, j'étais sur le palier d'une demeure faisant front à la boutique dont des sapeurs de feu appaisaient l'incendie. Toussant légèrement, mes poumons gorgés de la fumée qui avait fait fléchir ma constitution, je regardais ce lieutenant que j'avais interpellé avant de franchir la porte en flammes, qui avec quelques autres miliciens m'accordait un regard gratifiant, me faisant sourire, bien que quelques flammèches m'ayant effleuré au visage je ne pouvais guère bouger mes muscles faciaux, sous peine d'en souffrir.

"Beau travail, Maître. Le commerçant est sauf grâce à vous, il s'en est fallut de peu que vous y restiez en échange, mais le Seigneur a mené les sapeurs d'incendie à temps."

Ne répondant pas sur l'instant, j'apercevais le négociant, semblant inconscient, auprès de deux sentinelles, et entouré de deux femmes qui appliquaient quelques baumes sur ses brûlures. Rassuré, je laissais la toux me saisir à la gorge quelques secondes, puis tentais de me lever, mais ne parvins qu'à arriver semi-courbé au niveau des gardes, accoudé au mur qui se tenait jusqu'alors derrière moi.

"Faîtes mander un Ravhôk, que les vigiles urbani de l'exterieur de l'enceinte se tiennent parés, face à un pyromane de cet acabit, mieux vaut être paré. Les portes ont été closes?"

Hôchant positivement la tête, le lieutenant détourna ainsi que tous la tête vers les cieux, prêtant l'oreille, alors que mon interrogation trouvait sa réponse dans un cliquetis parcourant les rues de sous les pavés, et un grondement court et sourd, celui des gonds des portes axiales de la cité qui se scellaient.

#Un seul point faible, mais mieux vaut être rapides si nous ne voulons en pâtir de trop.#

Errant dans les rues, je m'arrête sur l'instant, puis fuis vite, me terrant à l'ombre d'une arcade, mon poing se serrant à chacun des pas battant le pavé que je perçois, les lourdes chausses des gardes frappant violemment le sol alors que la ville sort de sa torpeur, et qu'éffaré j'entends ce tumult de l'enceinte s'imperméabilisant. Alors que des habitants marchent déjà dans les rues, je reviens dans celles-ci, tentant de ne pas me faire remarquer, profitant que le jour ne soit pas encore levé, et que la garde ait déjà fort à faire. Voyant un badaud, je m'approche, les lèvres pincées, n'appréciant de devoir ainsi interragir avec les citadins, et encore moins d'être enfermé dans la ville.
"Qu'est-ce qu'il se passe?"

Réfléchissant, je n'avais remarqué l'individu qu'après quelques secondes qu'avaient accaparé les quelques flammèches subsistantes au coeur du magasin que les vigiles éteignaient, ne prêtant attention qu'à sa question, y répondant sans lui accorder un regard, celui-ci attaché aux gardes à qui j'indiquais la croisée de deux avenues vers l'Est, dont on voyait un flambeau dressé sur un pilier au centre du carrefour.

"Un homme a été violemment agressé, et son bâtiment incendié. N'approchez pas, laissez la Garde à son travail, citoyen."

Tandis qu'un milicien s'approchait de moi, je daignais enfin accorder un regard à cet individu, distrait certes, mais qui me troubla sévèrement, m'inspirant en cette heure un étrange effroi, alors qu'avec si faible lumière je ne voyais qu'une part de son visage, mais dont j'avais la désagréable impression qu'il était carnifié, une illusion que projetait mon esprit certainement, peut-être était-ce cette grande taille... Mais je cessais de regarder cet homme, une sentinelle m'interrompant.

"Maître, le commerçant a pu nous dire de quoi il retournait. Les sapeurs l'ont emmené, mais de leur propre avis il y avait des morts, dans le bâtiment. Tués par l'incendiaire."

A la vue de ma mine s'aggravant légèrement à ses paroles, le Garde se retira, m'offrant un salut que je lui rendis distraitement. Tentant de me relever, j'y parvins, une expression de douleur apparaissant sur mon visage, mais se dissipant alors que je faisais quelques pas gauches pour m'éloigner du mur, et me joignais à un groupe d'hommes en armes.

"Quelqu'un est-il allé voir si quelques mages se trouvaient au temple? La magie doit être traitée par la magie, des armes ne stopperont pas cet homme, pas dans de tels lieux, si exigus et labyrinthiques."

#Incendiaire et meurtrier, cela fait beaucoup. La ville n'est pas propice à une telle traque, avec un magicien pyromant.#

Etant parvenu à proximité de la porte principale, Ellamin observait les sentinelles patrouillant dans les ruelles, mobilisées en un nombre peu consequent, mais bien suffisant pour bloquer toute issue. La porte désormais scellée, l'érudit tentait d'élaborer un stratagème, qui lui vint naturellement, lorsqu'il entendit duex gardes qui avec zèle mais imprudence déblatéraient leurs ordres tels des ânes mal dégrossis.

*Des sapeurs de feu en faction à l'exterieur? Hm, cela serait dommage qu'ils se soient levés si tôt sans raison valable, menons ces boeufs à l'hécatombe.*

Souriant, le paladin s'éloigna des portes, un halo de feu cerclant son poing, décidé à mettre ces hérétiques en déroute dans leur propre capitale.

*Je pourrais essayer... Rien ne me tient, je pourrais toujours lâcher l'affaire si ça languit trop.*
Je m'approche de l'homme en blanc, qui semble détourner son attention de moi, écoutant ces gardes, alors que de l'aveu de celui qui s'est entretenu avec cet individu qu'il a nommé son "Maître" l'arrestation du responsable de cet esclandre requiert des forces plus vives que ces miliciens dont la frayeur se lit même dans leurs visages, fatigués et effarés. Se présente alors une chance de gagner une récompense, traquer un humain, il n'est plus facile, pour un prédateur, après tout.
"Je peux vous aider à le trouver..."

"La Garde prend place, Maître, plus qu-"

Transmettant mes instructions aux sentinelles qui une par une partaient en hâte, courant à travers les ruelles, je m'interrompis un instant, me retournant vers le grand être alors que mes subordonnés lui accordaient un bref regard, légèrement interloqués, mais s'executant sur le champ lorsque je les congediais. Ne bougeant pas, tant saisi par la surprise que par l'impotence momentanée qu'induisait mon triste état, je regardais ce mercenaire de pied en cap, considérant son immense stature, allant de pair avec cette face si déconcertante, mais voyant désormais le fil d'une lame jaillissant de son flanc.

"Vous êtes mercenaire? Je ne sais si un combattant saurait mettre un terme à cette agitation. L'homme que nous traquons en ce moment est un adepte de la pyromancie, il semblerait, brandir une arme n'est guère suffisant face à pareil individu, vous savez."

Je considérais pleinement l'homme, son physique impressionant, prompt à accepter son aide si sa témérité ne risquait d'être ébranlée par un fou courant de la sorte les rues. Me dressant aussi droit que possible, je fis quelques pas en arrière, m'éloignant de l'individu, observant l'astre de Yam qui n'était hélas que loin d'être prêt à céder sa place au Soleil, et fus saisis du spectacle qui s'offrait à la ville dans les cieux, excitant ma curiosité, puis exhalant mes pires craintes.

#Trop tard, cela a déjà commencé... Pas d'autre choix, mais ce mercenaire est-il donc sérieux?#

"On me serre au collet... Mais les chiens qui jappent à mes talons ne méritent nulle complaisance, les flammes savent faire la part, entre ceux qui arrachent leur droit de vie, et ceux qui succombent et se laissent consumer."

Courant à travers les rues, passant d'ombres en ombres, bifurquant par ces ruelles sinueuses aux si hautes cloisons, Ellamin semait le trouble dans la cité, parcourant les rues à son gré, incendiant les caisses laissées à l'abandon dans les rues, les victuailles des tonneaux, les mottes de paille et autres élements si sensibles aux flammes qui étaient si bêtement disposées dans les avenues. Propageant ses incendies dans toute la cité, la fumée s'élevant et stagnant désormais au-dessus de cette ville en proie à la panique, l'érudit décontenançait la garde qui perdait ses repères, ne pouvant visiblement agir en consequence, l'observait, ne riant pas, se lassant de ce jeu qui le temps passant encourageait le paladin à se plonger dans sa frénésie incendiaire.

*Soit ils libèrent la voie, soit ce seront mes demons qui abattront ces cloisons une fois ce capharnaüm et ses habitants dévorés...*

Je hausse la voix, m'emportant, mais ne mesurant que trop tard ce mouvement de colère, n'appréciant pas que mes capacités soient tant mises en question.
"Je peux traquer cet homme avec bien plus d'aisance que ces benêts en armure !"
Abaissant la tête, mes lèvres laissant apparaître une expression de hargne, ou tout du moins d'agacement, je fais silence, ne me souciant guère que cet incendiaire soit un magicien ou un fermier. Tout ce qui peut mourir étant à portée de ma lame, je n'ai de réel soucis à me faire, d'autant que percevant la fummée s'étendant au-dessus de cette cité, je peux bien croire que ces humains n'aient pas le choix. Ce garde, à ce qu'il semblerait, ayant pris ses distances, je me permets une reflexion anodine, n'aimant devoir attendre alors qu'il est déjà pris dans un contrat.
"Ca pue la magie des terres de Baal..."

Faisant abstraction de la douleur, je souris à ce grand homme, me tournant vers lui, le regardant amusé, bien qu'à la première entente de sa voix tonitruante assez déphasé. Les baumes appliqués sur mes membres passant enfin sous ma chair, je me déplaçais sans ressentir la douleur, et apposant ma main gauche sur le pommeau de l'épée reposant au fourreau que j'arborais à la ceinture étais désormais assuré que l'homme était interessé.

"Parfait. Cet homme en burre noire court dans les rues, il faut l'attraper le plus vite possible, le tuer si necessaire, et je crois que ce sera là l'unique solution, hélas, si nul primat du temple ne peut vous soutenir."

Rassuré par l'offre du mercenaire, je soufflais un instant, puis constatais éffaré que la lourde fumée noire s'accentuait dans les cieux, sous les rais de la pâle lune de Yam. Mon sourire s'affaissant, un Garde venait vers moi, l'air désolé et desemparé, la démarche hésitante, semblant avoir le souffle coupé.

"Maître, le mage a allumé plusieurs foyers. Il doit se terrer dans le quartier Est, près de la porte. Mais... Les vigiles ne pourront venir à bout de cela, surtout sans sécurité."

Méditant quelques secondes, je dissimulais le désespoir que m'inspiraient ces paroles et les obscures volutes planant dans les cieux, puis reprenais, d'un ton vif, ne désirant perdre davantage de temps.

"Que Gibrand et ses factions supportent les sapeurs de feu. Ouvrez les portes adjacentes, que les vigiles urbani à l'exterieur de l'enceinte viennent en aide, je régirai moi-même la manoeuvre. Mercenaire, vous savez dans quel quartier il se cache. Trouvez-le, et chargez-vous de lui. Allez, suivez-moi !"

#Ce pyromane est malin... Voire plus que je ne le pense?#

"Je suis avec vous."
Par reflexe, je tente d'abaisser davantage ma capuche, inutilement, de crainte que mon visage n'apparaisse à tous ces gardes stationnant si près de moi. Me doutant que ce "Maître" l'avait aperçu, je me demande l'espace d'une seconde pourquoi il n'avait agi, puis laisse cette idée se volatiliser, en même temps que je porte mon bras droit en arrière pour me saisir de la lame qui en un tintement se dévoile de tout son long à la lueur des flambeaux.
"Montrez le chemin."
*Quelle étrange nuit...*

Les Gardes nous précédant, ainsi que je l'avais demandé, je marchais rapidement, la course me semblant impossible pour l'instant, alors que quelques simples pas tendaient à prouver que je vacillais légèrement, l'une de mes jambes ne réagissant correctement, et me dirigeais en compagnie du mercenaire vers les avenues de l'axe Est de Loyda, où trônait la massive porte que les verins hydroliques avaient fermé, mais où je pressentais que nous pourrions également trouver notre lascar, une voie de secours demeurant toujours ouverte, tout du moins devant l'être désormais, afin que les vigiles puissent venir en aide aux sapeurs déjà présent, pour maîtriser les incendies.

"Nous nous séparons ici, citoyen. Hâtez-vous de le trouver, je vous prie. Nous tenterons de maintenir les issues, mais ces foyers se déclarant de part et d'autre du quartier ne doivent demeurer ainsi, stoppez-le."

Delaissant le colosse, j'accourrais auprès du lieutenant Gibrand, se tenant déjà arme en main auprès d'une unité qui s'affairait à ouvrir la voie secondaire. La porte, plus modeste de taille que la principale, ne laissant guère plus de place que pour laisser passer une charrue, cedant, quelques sentinelles s'y engouffrèrent, et revinrent, avec à leurs côtés les sapeurs entrant en vagues pour apporter leur aide.

#Si jamais c'est là sa stratégie, il faut esperer que le mercenaire pourra le prendre en tenaille avant qu'il ne mette ce plan à execution.#

"Maître, les vigiles urbani sont entrés, doit-on celer cette- ?"

"Non, non, malheureusement nous devons la maintenir ouverte, pour que les sapeurs puissent opérer. Prenez une formation ouverte tout autour de la place. Allez, courage, il faut rester vigilants."

Défourrant mon épée, j'échauffais quelque peu mon poignet en effectuant quelques moulinets, et en inspirant fort, pour que mon cerveau et mes membres soient le plus en alerte qu'il me soit possible.

Portant mon épée en arrière, je reste sur place tandis que le garde me distance, et balaye les rues du regard. Humant légèrement l'air, je me tourne vers une ruelle une fois quelques secondes écoulées, percevant une présence, dont je ne peux que sentir qu'elle est hors de portée ainsi. N'attendant davantage, je cours, traversant les ruelles tandis que je me fie à cette intuition, mes pas résonnant sur les pavés, à un rythme élevé, alors que ma course est effrenée. Traversant ainsi les avenues en hâte, je fais halte à l'embranchement de deux rues, et observe les environs, lorsque, élevant mon regard vers le ciel, apercevant les noires fumées stagnant sur la ville, je hausse un sourcil, et écarquille les yeux, pour pallier à la lumière trop faible encore.
*Beaucoup de foyers. Ils empestent presque autant que toi... Quel est ton plan, gibier?*
Portant ma lame en avant, je reprends ma course, m'engageant dans une ruelle bien sinueuse, mais dont la grande proximité avec la porte principale de la ville laisse présager de la rencontre que je peux y faire, ou tout du moins que le fil de mon épée peut faire.

HP: Désolé, inspiration faiblarde...

Lançant son regard en arrière, distrait par un bruit sourd alors qu'il observait au loin les gardes défilant dans les avenues et s'attroupant devant cette unique issue, Ellamin régait vivement en distinguant le fil d'une lame rutilante fondant sur lui, et l'évita de peu, la frappant du poing que les flammes encerclant rendaient moins sensible à la puissance qu'un tel choc peut avoir sur une ossature, comparée à l'imposante dimension de la pièce de métal.

"Vas, hérétique !"

Hargneux, l'érudit sut tout de même qu'il ne pourrait faire front en un lieu si confiné à un être maniant tel espadon. Projetant la lame dans une cloison, le paladin délaissa son agresseur en courant à travers la rue, débouchant sur la place où se dressait la porte dont émergeaient des pompiers.

*Ma meilleure chance !*

Entendant non loin le tintement caracteristique du metal sous un choc, je me tournais vers une ruelle dont l'embouchure était située à ma gauche, et m'avançais de quelques pas, alors que l'attention des Gardes se tenant à mes côtés redoublait. D'un geste, je demandais à l'une des sentinelles de me donner un des flambeaux trônant sur l'enceinte, et m'en saisissais alors que l'homme le brandissait d'une main tremblante.

"Vous êtes certain que-?"

Attrapant la pièce de bois incandescente, je tendais la pointe de mon épée vers le bas et adressais un sourire au Garde, compatissant avec les peurs qui l'assaillaient, et palpais dans l'air cette frayeur commune à tous les hommes présents sur la place, seuls moi et le lieutenant, se tenant plus en retrait vers la porte principale désormais scellée, que j'entrevoyais alors qu'il prenait en main l'intervention des sapeurs de feu, semblant calmes et raisonant posement vis à vis de pareille situation.

"Ne craignez rien, amis. Nous sommes dans la grâce de Yam, faisant front sous son auguste égide. N'aies pas peur, charge ta lame, emplis-la du souvenir des morts de cette nuit, et fauche l'avatar de tes craintes, tu seras toujours vainqueur, par-delà vie et mort, de ce démon, mon frère."

#Apprends-moi, Grand Architecte du monde,
A bien user du temps que tu me donnes pour travailler,
Et à bien l'employer sans rien en perdre.

Apprends-moi à tirer profit des erreurs passées
Sans tomber dans le crépuscule qui ronge.
Apprends-moi à prévoir le plan sans me tourmenter,
A imaginer l'oeuvre sans me désoler si elle jaillit autrement.

Apprends-moi à unir la hâte et la lenteur,
La sérénité et la ferveur, le zèle et la paix
Aide moi sur le chemin de la bonté, guide le fil de mon épée,
Aide moi au coeur du labeur à tenir le fil de la raison serré.

Grand Architecte du monde,
Dont tout le labeur de mes mains laisse une grâce de toi
Pour parler aux autres et un défaut de moi pour me parler à moi-même,
Garde en moi l'esperance de la Perfection, sans quoi je perdrais raison,
Garde moi de l'impuissance de la Perfection,
Sans quoi je me perdrais dans la Folie.
Purifie mon regard: quand je fais mal,
Il n'est pas sur que ce soit mal, et quand je fais bien,
Il n'est pas sur que ce soit bien.#

Me récitant un psaume, canalysant toute énergie dont mon corps recelait, je me préparais, reportant ma lame vers l'avant, redoutant, et m'attendant, à ce que le mercenaire n'ait pu que repousser son adversaire vers nous.

Reprenant ma lame en main, la hargne me gagnant alors que cet adversaire me narguait et fuyait, le lâche, je reprends ma traque, courant à vive allure, bien que l'humain, enfin à ce qu'il me semble être, soit doté d'une célérité des plus déconcertantes, malgré la cape flottant à ses trousses. En une unique charge, revenant autant que cela m'est possible à son niveau, laissant moi-même ma cape m'échapper, me garantissant une totale liberté de mouvement bien que laissant mon visage à découvert, je bondis en avant et martele le sol du puissant et rutilant, mais heureusement guère affuté, fil de ma lame, usant de son poids pour bloquer l'individu, sa cape se trouvant prise entre ma massive épée et les pavés s'étant brisés sous le choc.
"Où tu crois aller, ducon?"
Fermement décidé à ne pas laisser ce débile m'échapper, j'étreins de toute ma puissance le poignet, presque une hampe, de mon arme, laissant le mage s'étrangler, paré à déficher mon épée du sol pour faire vrombir sa lame jusqu'à son crâne si l'envie lui prenait de se retourner pour user de ses sombres facultés sur moi, bien qu'esperant le soutien des sentinelles que je vois plus loin, ce grand homme, enfin plus grand que tous les autres cornichons en armure, me faisant front, et semblant le plus proche.

"Là !"

Criant, regardant avec attention cette figure paraissant depuis l'embouchure d'une ruelle, sa face sous l'éclairage d'un flambeau, je désignais l'individu qui se tenait immobile face à moi, tendant mon épée à bout de bras dont la pointe visait le crâne du sombre individu, ne semblant mander qu'un peu d'allonge supplémentaire pour que sa cervelle soit scindée d'une frappe du fer en estocade. Les Gardes suivant du regard le fil de mon épée, le menant à ce rat dont on voyait enfin le museau, j'enjoignais, bien qu'en simple état d'homme d'arme, ma demande n'ayant encore trouvé d'échos, les primes sentinelles à mes côtés à apprehender le meurtrier, rassuré de voir l'imposante silhouette du mercenaire se dressant derrière lui, signifiant qu'il avait pris le pyromane, étant donné le fait que l'homme demeure immobile malgré pareille présence.

"Allons, tous trois, capturez ce scélérat. Tenez, usez-en, ce monstre est par trop dangereux."

Ne lâchant l'incendiaire du regard, je tendais un pendentif aux soldats, étrange artefact qui pouvait les protéger de l'insidieuse magie du pyromancien, dont je soupçonnais quelque odieuse fomentation, à l'expression qui déchirait son visage.

Surpris par telle offense du colosse à la lame démesurée, Ellamin dut sacrifier une pièce de sa cape, y faisant naître quelques flammèches qui eurent bientot assez dévoré les fibres pour que l'érudit puisse se dégager de l'épée de la créature, et lui offrant une assez grande liberté pour que le fil de celle-ci ne réussisse à le toucher, alors qu'il frappait à nouveau de son poing cerclé de flammes le plat de la pièce de metal, la chauffant légérement, la grande vitesse de cet opposant ne permettant au paladin de pouvoir chauffer de la sorte cette lame assez longtemps pour l'affaiblir.

*'Ducon'? Hum, c'est vraiment un Krosian, pas de doute. Lâche et traître, immonde...*

Ainsi libéré, mais cet être aux trousses, Ellamin parvint sur le champ sur la place, qu'occupaient déjà les soldats, avec ce commandant à leur tête, trois de ces vermines venant à sa rencontre. Profitant que leur attention ait été détournée par l'intervention de ce stupide garde l'épée brandie en avant, l'érudit défourra sa katzbalger et l'emporta avec lui, alors que des flammèches tournoyaient avec lui, sa cape disséminant les fragments pyrotiques tout autour du paladin de sorte à ce que nul ne puisse l'approcher alors qu'il se saisissait de son otage. Dégageant sa lame, tirant le garde par le collet, s'engouffrant par cette large porte unique issue sans être inquiété des sentinelles entravées par leur acolyte constamment situé entre l'érudit et ses poursuivants, Ellamin repoussa son captif déboussolé vers des échaffauds établis autour de l'enceinte de la ville, alors qu'un pan de celle-ci était en entretien, et la fit se briser sur l'otage, quelques flammes dévorant les liens que le choc avec le soldat suffit à rompre. Les étais s'éffondrant, croulant à l'embouchur de l'issue, le paladin se trouvait hors de portée de ces hérétiques pour l'heure, le manque de réactivité des gardes exterieurs, trop affairés avec les sapeurs de feu encore retenus hors des remparts, facilitant sa fuite.

*Ville de fous, et de faibles. Ils jettent l'opprobre sur toi, Infâme trônant dans les cieux, imposteur, et leurs pathetiques mesures s'écrouleront tel cet échaffaud sous tes yeux, pour brûler dans nos flammes...*

Agitant mon épée à qui mieux mieux, je brise les rondins amassés devant l'issue de la ville, et fais quelques pas, esperant que ma proie aurait été stopée par les sentinelles postées à l'exterieur, mais constate que ce n'est pas le cas. Aidant l'homme à se relever, bien que l'effondrement de ces passerelles lui aient infligés de sérieux dommages, je me remets de la course haletante aux trousses de l'humain progressivement, l'imposante lame de mon épée reposant à terre, mais à l'approche de gardes la faisant basculer sur mon épaule, dissimulant ma figure de sa tranche des hommes passant à proximité de mon visage découvert.
"Je peux pas aller plus loin, la gamine m'en voudrait. Un coup pour rien..."

HRP: L'humain, est-ce moi? La jonction est étrange, je ne sais pas s'il s'agit d'un des soldats ou de moi pris en otage, je vais donc faire comme si c'était dans le second cas, ça limitera les pertes.

Le mercenaire me tendant la main, je l'attrapais, poussant un léger soupir, après les flammes m'ayant léché, un échaffaud ployant au-dessus de moi, voilà qui pouvait être nommé une mauvaise nuitée. Fort heureusement, les pertes humaines ayant été moins sévères que je le craignais, je pouvais me relever sans trop de remords, observant les cieux dont l'obscurité se dissipait fort légèrement, le jour menaçant de poindre d'ici quelques heures. Posant un regard furtif sur la figure du colosse qui m'avait aidé, mais n'avait étrangement pas désiré poursuivre l'incendiaire, je me tournais vers les Gardes qui, leurs pas claquant au sol, s'approchaient, dissimulant par courtoisie le mercenaire dont je devinais qu'il préférait ne pas être vu des sentinelles.

"Sir Kezahr, vous en êtes sortis ! Quel talent !"

"Talent? Je ne vois nul talent, seule la grâce de Yam m'a épargné la vie, amis..."

#Il ne m'a pas tué, il en avait l'occasion... Il ne le voulait pas?#

Mes jambes flageolantes, je prenais une fois de plus appui contre un mur, en cette occasion l'enceinte de la cité, et regardais les vigiles urbani défiler, les foyers ayant été en majorité apaisés, quelques menus brasiers subsistant, mais ne représentant nul danger.

"Pourqu- [je reprenais mon souffle, de même que mon grand acolyte] Pourquoi avez-vous cessé la poursuite, mercenaire? Vous doutiez de l'attraper? Je ne vous en veux pas, mais j'ai du mal à... saisir."

"Désolé, mais j'ai un contrat actif, je ne peux pas sortir de la ville, pas pour revenir bredouille."
Je regarde du coin de l'oeil les gardes passant à proximité, puis leur emboîte le pas avec mon interlocuteur, reprenant l'issue que j'avais dégagé pour revenir sur la place, où j'use de l'humain m'accompagnant pour reprendre la ruelle où les pavés s'étaient brisés, et ma cape avait été jetée en arrière, pour optimiser l'ampleur de mes mouvements et de ma course. La rajustant à mes épaules, faisant retomber la capuche sur mon visage, je me retourne vers l'homme, le frappant à l'épaule avec reconnaissance, faisant presque une accolade alors que je riais très légèrement.
"Merci de pas m'avoir dénoncé aux gardes pour mes... origines. Elles m'attirent nombre de problèmes, mais vous m'avez évité d'en avoir. Merci de cette tolérance..."